ACTUALITÉ
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Quelques commentaires, sérieux ou frivoles,
sur l'actualité européenne


"L'euro rebondit face au dollar" (27 juillet 99) 
On surestime toujours trop les européistes: victimes de notre indulgence coupable, nous nous étions persuadés que, en cas de regain de valeur de l'euro, les européistes auraient la décence de ne pas pavoiser et de nous épargner de grandes théories qui pourraient, comme les précédentes ne durer que quelques semaines. 
Quelle erreur de notre part!
L'euro fort 
est une grande 
victoire de l'euro!
 
L'euro faible 
est une grande
victoire de l'euro!
 
Aux tous premiers jours de l'année 99, l'euro progressa par rapport au dollar. Les européistes exultèrent: c'était immense succès pour l'euro qui allait détrôner le dollar! Les États-Unis n'avaient plus qu'à bien se tenir avec leur monnaie de singe!

Puis, l'euro commença à chuter face au dollar, de manière presque ininterrompue, passant de 1,18 à 1,01$, ie une baisse de 14%. Était-ce un échec pour l'euro? Bien sûr que non! glapirent les européistes, indignés. Ils submergèrent alors les médias de théories expliquant la chute de l'euro: la meilleure santé des États-Unis, la guerre du Kosovo, Oskar Lafontaine, la logorrhée de commentaires des gouverneurs de banques centrales et des ministres, etc... Unanimes, ils avaient la même conclusion: l'effondrement de l'euro ne remet pas en cause le projet et pourrait même être positif pour les exportations européennes.
 
Depuis que l'euro a remonté face au dollar (d'environ 5% les dix derniers jours de juillet), les européistes n'ont pas pu se retenir: le dépit que leur procurait la faiblesse de l'euro était trop grand. Oubliant toutes les théories sur la chance que constituait l'euro faible, ils se sont surpassés pour expliquer les raisons de ce revirement et s'en réjouir: le Monde fait sa «une» sur "l'euro rebondit face au dollar" et écrit "l'euro bénéficie avant tout des signes d'accélération de la croissance sur le Vieux Continent" (28/7/99). 
L'aveuglement idéologique des européistes leur interdit d'entrevoir la véritable raison de la remontée de l'euro: ce n'est pas l'euro qui reprend des forces, mais le dollar qui a actuellement un accès de faiblesse. Le tableau montre que le dollar a baissé face à l'ensemble des grandes monnaies, et pas seulement par rapport à l'euro.
Cours du dollar
 
 
rien
 
¥  
(100)
 
£ 
rien
 
Franc 
suisse
 
27 juillet
1,06665
0,85811
1,59400
0,66525
16 juillet
1,02055
0,82730
1,56855
0,63545
Baisse du $
- 4,5%
- 3,7%
- 1,6%
- 4,6%
 
En effet l'économie américaine va tellement bien qu'on craint des risques de surchauffe ou d'inflation; le président de la Réserve fédérale a annoncé qu'il pourrait être amené à augmenter les taux d'intérêt si ces risques se confirmaient. 
N'en déplaise aux européistes, il s'agit donc bien d'une faiblesse, passagère ou durable, du dollar. En dépit de leurs nouvelles élucubrations, c'est toujours en référence au dollar et non en référence à la situation de l'Union européenne ou à l'euro que se déterminent les parités des monnaies. Bref, l'arrivée de l'euro n'a rien changé et surtout pas la suprématie monétaire américaine.
Cocorico! Une Française présidera le parlement européen (juillet 99) 
L'élection de Mme Nicole Fontaine à la tête du «parlement» européen a été accueillie avec des cris d'allégresse en France. Cette élection "honore la France", a commenté Chirac. Cocorico? Y-a-t-il lieu de se réjouir de ce choix? Il semble que oui.
 
Nicole Fontaine
 
Une Française? 
Non pas parce qu'elle est française. Une fois de plus, les eurosceptiques se révèlent moins chauvins et franchouillards que les européistes tels que Chirac et nous nous moquons bien que cette dame soit présentée comme française. Après Delors à la commission de 84 à 94 et Michel Camdessus au FMI (Camdessus "que, dans les couloirs de l'organisations financière internationale, l'on surnomme et pas toujours avec gentillesse, l'«Américain»" Le Monde 22/7/99),nous savons trop bien comment se comportent les élites (sic) françaises (re-sic) quand la France commet l'imprudence de les faire nommer à la tête d'organisations internationales: elles pratiquent cette forme d'altruisme dévoyé qui considère que chaque intérêt national est légitime à défendre, à l'exception de l'intérêt national français, ce qui provoque l'étonnement de nos partenaires étrangers, tel cet ancien secrétaire anglais au Foreign Office qui ricanait dans les années 70: "il est important de nommer un Français à la tête des organisations internationales. Ainsi on est assuré que les intérêts de la France ne seront pas défendus!". 
Dans ces conditions, peu importe la nationalité, réelle ou supposée, de l'intéressée. 
Une inconnue qui gagne à le demeurer 
Le plus réjouissant dans cette élection est que les institutions européennes restent aux mains de gens qui gagnent à ne pas être connus: l'illustre Mme Fontaine, qui succède au fameux José-María Gil-Roblès, présidera donc le «parlement» censé contrôler le travail du «gouvernement» de l'Europe, selon le terme du professeur Prodi pour qualifier la commission qu'il dirige. Ce «gouvernement» sera animé par des «ministres» dont le charisme le dispute à la notoriété: de Gibraltar à Helsinki, nul n'ignore la vie et l'oeuvre de Margot Wallström, de David Byrne, de Pascal Lamy, de Michaela Schreyer ou de Philippe Busquin. 
La popularité pan-européenne de ce nouveau «gouvernement» est telle que celui qui préside la «cour de justice» de Luxembourg pourrait en prendre ombrage: en effet, l'illustre Gil Carlos Rodrigues Iglesias, puisque -comme chacun sait- c'est lui qui a l'anodine tâche de rendre des jugements qui prévalent sur les constitutions, pourrait s'offenser d'avoir à partager la une des «news-magazines» avec le «gouvernement» européen, honneur qu'il ne cédait d'ordinaire qu'aux personnalités de son rang, Mlle Lewinsky ou M. Kennedy Jr. 
Qui est Nicole Fontaine? 
Plus sérieusement, si aujourd'hui Mme Fontaine se déclare satisfaite et émue de sa nouvelle fonction, ce n'est que faute de mieux. Sublime, elle affecte de préférer être première à Strasbourg que seconde à Paris, mais parce que son opportunisme pour obtenir un ministère (un vrai, pas un poste de commissaire) a échoué: son choix tactique pour Chirac lors de la présidentielle de 95, alors que tout la rapprochait de Balladur, ne fut pas récompensé par un maroquin. Elle demeura donc à Strasbourg, maudissant le sort injuste qui semble la condamner à la relégation. On murmure, en outre,  que son sens du compromis devrait l'inciter à la conciliation à l'endroit de la minorité socialiste, ce  qui ne surprendra personne, la démocratie-chrétienne à laquelle elle appartient ayant toujours considéré la génuflexion devant l'adversaire comme une vertu théologale. Si bien que l'assemblée ne devrait pas être le théâtre de débats d'idées mais rester un lieu de tractations discrètes et d'échange de bons procédés, comme sous la IVè. 
Donc il y a lieu de se satisfaire de ce choix: avec Nicole Fontaine à sa tête, le «parlement» européen restera ce qu'il n'a jamais cessé d'être: rien, ou si peu.
Blair versus Thatcher  (juillet 99) 
Une controverse sur l'Europe vient d'opposer Tony Blair à Margaret Thatcher. Devinez lequel des deux nous allons défendre? Perdu! c'est Tony Blair! 
Bien entendu, l'euroscepticisme de Thatcher nous est plus sympathique que l'européisme hystérique de Blair. Toutefois, l'actuel premier ministre vient de reconnaître implicitement l'argumentation principale de notre site, à savoir qu'il est absurde et malhonnête d'opposer la construction européenne et les États-Unis, puisque la fédéralisation de l'Europe est l'oeuvre des États-Unis et de l'Allemagne.
 
La Baronne Thatcher
 
Tony Blair
 
Inquiet de l'euroscepticisme ambiant de ses compatriotes, que les élections européennes ont confirmé, Blair ne manque jamais une occasion de chanter les louanges de l'euro et de l'Union européenne; son dernier argument en date est le suivant: "le meilleur moyen d'influencer les États-Unis est de passer par l'Union européenne". (Le Monde 15/7/99) 
Nous n'épiloguerons pas sur le fait que l'ambition de la diplomatie britannique semble désormais se résumer à être proche des États-Unis en toutes circonstances; nous le savions déjà, de même que les Serbes et les Iraquiens. Être du côté du manche a toujours été la préoccupation majeure des centristes... 
En revanche, il est inhabituel qu'un politicien anglais brise un des plus vieux tabous du débat politique et surtout qu'il réfute la pseudo alternative "l'Union européenne ou l'OTAN" 
Jusque à présent, la quasi totalité de la classe politique britannique se contentait de se gargariser de la «relation spéciale» qui unirait les États-Unis et la Grande-Bretagne, et affirmait refuser d'avoir à choisir entre Washington et Bruxelles. La baronne Thatcher, qui semble mal vieillir, s'est crue obligée d'entonner à nouveau la ritournelle, dans un article au Sunday Telegraph (12/7/99): la Grande-Bretagne, affirme-t-elle, a "beaucoup plus en commun avec les États-Unis qu'avec l'Europe", et "la relation transatlantique doit demeurer au coeur de notre diplomatie", etc... 
Il est réjouissant que Tony Blair, lui, se soit rendu compte que, en diplomatie, l'amitié entre les peuples n'existe pas, que "si la relation spéciale anglo-américaine persiste, c'est davantage dans le coeur de Londres que dans celui de Washington" (Bruno Colson) et qu'il est vain d'opposer L'Union européenne et l'OTAN, puisque c'est Washington qui a porté la construction européenne sur les fonts baptismaux. Quant à la pauvre Margaret Thatcher, qu'on a connue mieux inspirée, elle s'accroche à des idées tellement sottes et fausses qu'elles pourraient, mutatis mutandis, émaner d'européistes français. 
Il y a en effet un jeu de miroir amusant entre les eurosceptiques Tories et les européistes français. Tous deux ont un grand satan: l'omnipotence américaine pour les Français, l'Europe fédérale pour les Anglais. Et tous deux ont une potion magique pour s'en préserver. L'Europe fédérale pour les européistes français, le renforcement du lien atlantique pour les eurosceptiques anglais. Bref, une hallucination des deux côtés de la Manche, qui refuse de voir qu'il est absurde d'opposer l'Allemagne aux États-Unis, les deux complices de la construction de l'Union européenne, ce Saint Empire ricain-germanique. 
En reconnaissant que l'intérêt des États-Unis consiste à ce que la Grande-Bretagne devienne le plus fidèle élément d'une Europe intégrée, Blair vient de contribuer à dissiper les contrevérités que l'on entend en France, méritant en cela et pour la première fois, le tapage de louanges qui lui est fait ici. En France, la classe politique, (Bayrou, Fabius, Sarkozy...) se dispute l'insigne honneur de devenir le «Blair français». Il est hélas à regretter que le futur Blair français laisserait à la douane la lucidité sur l'Europe.
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