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Qui
sera Monsieur PESC? (mai 99)
À ce jour, seuls
deux candidats sérieux se sont fait connaître pour devenir
"Monsieur PESC", c'est- à- dire celui qui incarnera la politique
étrangère et de sécurité commune (PESC) prévue
par le traité de Maëstricht. Il s'agit de M. Javier Solana
et de M. Günther Verheugen. (Le Monde
3/5/99)
Le premier est l'actuel
secrétaire-général de l'OTAN, le second est le secrétaire
d'État allemand chargé des affaires européennes.
Javier Solana |
Günther Verheugen |
Quel que
soit l'heureux élu, il y a lieu de se réjouir de ces deux
candidatures. Elles dissiperont un peu la confusion que les européistes
entretiennent sciemment sur les enjeux européens.
Si l'Allemand est élu,
il apparaîtra plus clairement que la construction de l'Europe est
une entreprise allemande, et ceux qui ne s'en sont pas encore aperçus,
constateront que les positions américaines et allemandes sont systématiquement
identiques.
Si Javier Solana est élu,
il sera facile pour les eurosceptiques de montrer que, de l'OTAN à
la PESC, la conversion ne devrait pas être trop brutale pour Solana,
qu'il continuerait le même travail sous une casquette à peine
différente, qu'il n'y a nulle coïncidence géographique
au fait que l'OTAN et l'UE soient toutes deux situées à Bruxelles.
Dans un cas comme dans l'autre, il sera un peu plus évident que
l'Union européenne est un projet germano-américain destiné
à co-diriger l'Europe.
Enfin, il sera clair désormais
que les pays européens autres que la France ne veulent pas avoir
de politique étrangère indépendante des États-Unis.Car
MM. Solana et Verheugen, s'ils sont par ailleurs des gens charmants, ont
à peu près autant d'autorité et de prestance qu'un
hérisson dépressif. Qui pourra croire que l'Europe veut s'affirmer
dans le monde sous la bannière de ces deux demi-solde?
De
Gaulle européiste? (mai 99)
On assiste ces temps-ci
à une entreprise de révisionnisme historique qui cherche
à faire croire que De Gaulle était un partisan d'une Europe
fédérale. Ce détournement n'est pas nouveau: déjà
en 1992 Jacques Delors n'avait pas craint d'affirmer que De Gaulle aurait
répondu «oui» au traité de Maëstricht.
Dans une tribune libre hystérique
(le
Monde 14/1/99), François Léotard
évoque l'"Europe nouvelle que le général de
Gaulle n'allait pas tarder à concevoir dans une approche profondément
renouvelée de l'idée de nation. Non plus la «nation
contre» mais la «nation avec»". Dans un supplément
du Monde (6/5/99), l'ancien
directeur André Fontaine écrit: "Pour De Gaulle, c'était
le seul intérêt de cette Europe «européenne»,
dont il a tant contribué, en consacrant la réconciliation
franco-allemande, à consolider l'assise. Lorsqu'il rêvait
avec Kennedy de faire de l'Europe un «second pilier» de l'Alliance
atlantique, pesant d'un poids égal à celui de l'Amérique,
l'ambition de Monnet était-elle si différente?".
Monnet,
De Gaulle, même combat en quelque sorte...
On pourrait faire de l'ironie
facile, tellement il est évident que cette prose dérisoire
cherche à faire oublier que le Monde n'a jamais cessé
d'éreinter la politique étrangère du Général,
quand celui-ci était au pouvoir.
Plus sérieusement,
il est absurde de faire croire que De Gaulle ait pu partagé la volonté
de Monnet, ou de ses épigones actuels, de construire une Europe
fédérale sur la ruine des nations. Tous ses gestes et ses
discours, publics comme privés, attestent du contraire. Le 15 mai
62, les cinq ministres MRP (centristes) ont quitté le gouvernement
pour protester contre la politique européenne de De Gaulle qui refusait
le fédéralisme. Le 20/12/62, De Gaulle déclare à
Peyrefitte (C'était De Gaulle T.1, Fayard p.276): "à la première
initiative que je prendrais pour assurer l'indépendance du pays,
pour expédier ad patres leur dada de supranationalité,
c'est-à-dire l'abaissement de la France, je les [les centristes]
aurais contre moi; ou alors pour les ménager, il faudrait que je
fasse des concessions à leurs chimères, c'est-à-dire
que je renonce à une politique étrangère qui en soit
une." Le 1/7/65 il déclare au même (C'était De Gaulle
T.2, Fayard p.291): "le problème, c'est toute cette maffia des supranationalistes,
qu'ils soient commissaires [européens], parlementaires ou fonctionnaires,
ce sont tous des ennemis. Ils ont été mis là par nos
ennemis".
Tout est dit: le fédéralisme
à la Monnet est "une chimère", la supranationalité
"un abaissement de la France", les partisans de l'Europe fédérale
des ennemis de la France et des maffieux. Appeler De Gaulle à la
rescousse pour défendre la cause européiste est une forfaiture.
Un
président pour l'Europe? (mai 99)
Cette étonnante proposition
figure dans le programme des ayatollahs de l'Europe fédérale,
l'UDF. Nos amis centristes ne précisent pas quels seraient les pouvoirs
de ce président de l'Europe.
Un président chef
d'un exécutif fort? Mais ce système n'existe qu'en France:
les autres pays sont attachés à leur démocratie parlementaire,
et les statuts du PPE (Parti populaire européen, groupe regroupant
les différents partis de centre-droit au "parlement" européen)
ne prévoient nullement l'instauration d'un système présidentiel.
Un président-potiche
alors, comme sous la IIIè et IVè République? Mais
est-ce bien le rôle de l'UE de fournir une maison de retraite à
Jacques Delors, à Valéry Giscard d'Estaing ou à d'autres
V.I.P. sur le retour qui ne sauraient se satisfaire des mouroirs traditionnels
des politiciens de moindre importance, le Sénat et Conseil économique
et social.
D'autant plus emportés
par leur audace que celle-ci a longtemps été refoulée,
les héritiers de Jean Monnet et d'Eugène Claudius-Petit réclament
avec fougue une constitution pour l'Europe. La proposition est originale
mais comment concilier dans une même constitution des républiques,
des démocraties parlementaires et des monarchies constitutionnelles?
En tuant rois, reines et autres grands-ducs? Les jacobins-centralisateurs
auteurs de ce site en salivent d'avance et se réjouiraient pour
la première fois d'une réalisation de l'UE, si celle-ci raccourcissait
le Prince Charles et quelques autres altesses. Il est cependant improbable
que les Anglais, les Espagnols et les autres, qui croient encore aux mythes
puérils de roi arbitre ou incarnation de l'unité, s'y rallient.
Baisse
des taux d'intérêt: la réalité reprend ses droits
(avril
99)
Après les délires
idéologiques du début d'année lors de la naissance
de l'euro, place aux travaux pratiques et aux réalités concrètes:
quel taux d'intérêt appliquer à l'"Euroland" quand
les économies européennes traversent des situations divergentes?
L'Allemagne et l'Italie sont au bord de la récession et auraient
besoin de taux très bas; la France est un peu mieux lotie et se
contenterait d'une légère baisse, d'autres pays en revanche,
l'Espagne, l'Irlande, le Portugal et la Finlande ont toujours une croissance
soutenue qui pourrait devenir inflationniste si les taux baissent trop.
Bien entendu, c'est la situation
de l'Allemagne qui a dicté la forte baisse de 3 à 2,5% du
taux directeur de la BCE, métastase de la Bundesbank. Même
les partisans de l'Europe allemande en conviennent: la baisse des taux
"apparaît
avant tout comme une réponse aux difficultés de l'économie
allemande et aux menaces qui planent sur elle" (Le Monde 16/4/99).
Les journaux espagnols s'en
inquiètent: "une baisse considérable par laquelle la BCE
tente de ranimer les économies de l'euro et qui bénéficie
surtout à l'Allemagne et à l'Italie, qui présentent
le plus de symptômes de récession sans risque inflationniste.
Pour l'Espagne au contraire, la baisse des taux n'arrive pas au meilleur
moment, déjà que les prévisions d'inflation sont à
la hausse. (El país 9/4/99)
On ne pouvait espérer
une meilleure entrée en matière pour l'euro. Les économies
européennes n'évoluent pas au même rythme et par conséquent
ont besoin de taux d'intérêt différents d'un pays à
l'autre. L'euro n'est pas une nécessité économique
mais un projet idéologique.
Réfugiés
du Kosovo: encore une contradiction européiste (avril
99)
Que faire des réfugiés
Kosovars? Les accueillir dans les différents pays de l'UE comme
le proposent l'Allemagne et quelques autres? Ou les maintenir dans les
pays voisins du Kosovo, au motif que les accueillir chez soi reviendrait
à entériner la purification ethnique. Jospin et Chirac sont
de fermes partisans de la seconde solution. Ils semblent avoir oublié
le traité d'Amsterdam qui prévoit la fédéralisation
de ces questions. Après le passage à la majorité qualifiée
dans cinq ans, si une majorité d'États, autour de l'Allemagne,
décide d'accueillir les réfugiés du Kosovo ou d'ailleurs,
la France sera obligée de se soumettre et d'héberger son
lot de réfugiés, même si elle juge que cette politique
se rend complice des exactions. Chirac et Jospin ont bien raison de profiter
de ces dernières années de souveraineté.
Européisme:
les curés s'en mêlent...
(mars 99)
Déjà l'Europe
avait emprunté à l'Église catholique quelques uns
de ses usages, le principe de subsidiarité entre autre, et jusque
à récemment, l'arrogance de la commission laissait penser
que celle-ci était dotée de l'infaillibilité pontificale.
On avait aussi noté que les régions les plus européistes
étaient de bonnes terres chrétiennes (la Bretagne est une
des régions où le traité de Maëstricht a été
voté avec le plus de ferveur).
Une question se pose: le
Saint-Esprit guide-t-il la construction européenne? Il semblerait
que oui: le 23 mars 1999, la commission sociale des évêques
de France a publié un livre (co-édité par Mame/ Cerf/
Le centurion). Après quelques banalités sur "les affaires"
qui "sapent la confiance des citoyens", le désintérêt
croissant pour la chose publique, et diverses considérations subtiles
comme un éditorial du JDD, les saints hommes plaident
pour
"un pouvoir politique de niveau européen".
Nos européistes dont
beaucoup sont des culs bénis (Delors, Bayrou, Méhaignerie,
Robert Schuman†) et dont la pensée politique se résume
souvent aux encycliques du Pape, obtiennent ainsi le renfort spirituel
de leurs directeurs de conscience pour excommunier les mécréants
eurosceptiques.
Bismarck aimait à
répéter: "catholicisme et ennemi de la Prusse sont deux synonymes".
Les temps ont bien changé: il semblerait qu'aujourd'hui catholicisme
et partisan de l'Europe allemande soient devenus synonymes.
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